Quand on parle de réussite scolaire, on pense d’abord aux professeurs, aux programmes, aux manuels. Mais une composante essentielle, souvent négligée, reste l’infrastructure. Bâtiments, salles de classe, laboratoires, équipements… tout cela forme la base de l’expérience d’apprentissage. Si on n’y fait pas gaffe, cela peut sérieusement impacter la qualité de l’enseignement. D’ailleurs, une étude britannique récente montre que les infrastructures scolaires expliquent à elles seules jusqu’à 16 % des différences de réussite entre les élèves. Le point sur le sujet avec Denis Bouclon !
Une étude révélatrice sur l’influence des infrastructures scolaires
Nous vous le disions, une étude récente menée au Royaume-Uni montre que l’environnement scolaire peut expliquer jusqu’à 16 % des variations de réussite des élèves de l’enseignement primaire. Trois caractéristiques principales se dégagent : les infrastructures doivent être naturelles, avec une bonne luminosité et une qualité de l’air adéquate ; stimulantes, grâce à des couleurs et une complexité architecturale appropriée ; et enfin individualisées, en offrant des espaces flexibles permettant une meilleure adaptation aux besoins des élèves.
Malgré cette prise de conscience de l’importance de l’environnement scolaire, de nombreux pays continuent d’adopter une approche fragmentée en matière de développement des infrastructures. Prenons l’exemple de la Roumanie, où les décisions sont prises de manière décentralisée, sans coordination globale, souvent en réponse à des besoins ponctuels et avec des ressources limitées. Ce manque de stratégie nationale a laissé de nombreuses écoles, notamment dans les zones rurales, sous-équipées. Les élèves issus de milieux défavorisés, souvent en milieu rural, sont les premiers touchés par ces manquements : 72 % des collèges et lycées en zones rurales manquent de laboratoires de sciences, et près de 40 % n’ont même pas de latrines intégrées. Dans les villes, la situation est également préoccupante, avec un quart des élèves qui fréquentent des écoles surpeuplées, forçant certaines à organiser des cours en plusieurs vacations.
Un plan d’investissement trop morcelé
Les établissements scolaires en Roumanie, particulièrement ceux des zones marginalisées, sont ceux qui ont le plus grand besoin d’investissements. Ces élèves, souvent issus de familles à faible revenu, doivent faire face à des conditions d’apprentissage difficiles dans des écoles mal loties. Les infrastructures obsolètes et l’absence d’une politique cohérente de développement ne font qu’amplifier les inégalités. La surcharge des classes dans les établissements urbains, où les élèves se bousculent dans des salles bondées, pose aussi un problème majeur à la qualité de l’enseignement.
Depuis 2016, un programme visant à remédier à ces défis a été mis en place en Roumanie. L’une des premières étapes de ce programme a été la collecte et l’analyse de données à grande échelle, une démarche inédite dans le pays. En plus des informations issues du Système informatique intégré de l’éducation, des données ont été recueillies sur l’état des infrastructures des écoles maternelles aux universités, ainsi que sur l’offre et la demande dans la formation professionnelle et l’enseignement supérieur. Les résultats sont alarmants : dans certaines écoles de Bucarest, les niveaux de dioxyde de carbone sont entre deux et cinq fois supérieurs aux seuils acceptables pour un cadre scolaire sain.
Identifier les enjeux majeurs de l’éducation
Dans les municipalités où les élèves sont scolarisés dans des établissements surpeuplés, on observe des taux plus élevés de redoublement, d’abandon scolaire et une disparité entre l’âge et le niveau d’études des élèves. Cette corrélation montre que des infrastructures inadéquates, combinées à un environnement d’apprentissage dégradé, ont un impact direct sur la réussite des élèves. Par ailleurs, l’encombrement des établissements a une influence notable sur la disparité entre l’âge et l’année d’étude, notamment dans le second cycle de l’enseignement secondaire.
Face à ces défis, la Roumanie dispose de fonds importants grâce à son statut de membre de l’Union européenne. Elle peut mobiliser jusqu’à 850 millions d’euros, via le Fonds européen de développement régional et le Fonds européen agricole pour le développement rural, pour améliorer ses infrastructures scolaires d’ici 2023. Cependant, pour maximiser l’impact de ces investissements, il faut prioriser les projets en fonction des besoins spécifiques des établissements. L’équipe de la Banque mondiale a développé un ensemble de critères, basés sur quatre thématiques principales : l’évolution démographique, les besoins des établissements, les solutions de transport alternatives, et la demande en compétences sur le marché de l’emploi.